Le plan Osez l’IA vise à rendre l’IA accessible, concrète et utile pour toutes les entreprises françaises d’ici 2030. Les objectifs chiffrés sont ambitieux : d’ici 2030, 100 % des grands groupes, 80 % des PME/ETI et 50 % des TPE devront utiliser l’intelligence artificielle dans leurs activités. Autrement dit, même la petite entreprise normande du coin est invitée à embarquer dans le train de la transformation digitale via l’IA. Pour atteindre cette cible, le gouvernement a débloqué 200 millions d’euros et articulé son plan autour de trois axes : sensibiliser, former et accompagner. Concrètement, plusieurs actions phares vont voir le jour :
En résumé, Osez l’IA déploie l’artillerie lourde pour que l’IA essaime sur tout le territoire – y compris en Normandie. Des événements sont prévus chaque mois dans les régions, en s’appuyant sur les réseaux locaux (CCI, DREETS, French Tech Normandie, Inria, etc.), afin de diffuser les bonnes pratiques le plus largement possible. L’idée directrice : plus aucune entreprise ne doit se sentir trop petite ou isolée pour profiter, elle aussi, de l’intelligence artificielle.
Autre enseignement des études récentes : qui est aux commandes de l’entreprise joue beaucoup dans l’adoption de l’IA. Le facteur générationnel notamment crée de vraies divergences. Plus le dirigeant est jeune et formé, plus son entreprise a de chances d’être en avance sur l’IA. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 67 % des dirigeants de moins de 35 ans utilisent personnellement des outils d’IA générative (de type ChatGPT) dans leur travail, contre seulement 46 % des plus de 45 ans. Pour les plus de 65 ans, ce taux tombe à 36 %. Le niveau de formation du dirigeant compte aussi : parmi ceux ayant un diplôme Bac+5 ou plus, plus de la moitié pratiquent l’IA, contre moins de 20 % chez les non-diplômés. Enfin, même le genre semble avoir un effet : 48 % des dirigeants (hommes) interrogés déclarent utiliser l’IA générative, contre 38 % des dirigeantes. Bref, l’IA creuse un écart entre d’un côté des décideurs plutôt jeunes, technophiles, proactifs, et de l’autre des profils plus traditionnels ou méfiants.
On retrouve ainsi plusieurs « profils type » de patrons face à l’IA. Bpifrance Le Lab distingue par exemple les « Sceptiques » (27 % des dirigeants, franchement réfractaires et peu digitalisés), les « Bloqués » (26 %, conscients de l’importance de l’IA mais freinés par le manque de compétences ou de moyens), les « Expérimentateurs » (28 %, curieux qui testent des solutions mais peinent à déployer à grande échelle) et enfin les « Innovateurs » (19 %, à la tête d’entreprises déjà très digitalisées, intégrant l’IA partout et formant activement leurs équipes). On s’en doute, les Sceptiques sont sur-représentés dans les secteurs les plus traditionnels (construction, transport...), tandis que les Innovateurs pullulent dans la tech, la finance ou les services aux entreprises. Ces inégalités devant l’IA posent un vrai défi : il va falloir « évangéliser » et accompagner tous les dirigeants, quel que soit leur âge, leur parcours ou leur localisation, afin que personne ne reste au bord de la route du progrès.
Parlons-en, de la localisation. On sait que les innovations numériques ont tendance à se diffuser plus vite dans certains territoires (typiquement, les métropoles dynamiques) que dans d’autres zones plus rurales ou éloignées des grands pôles. Les PME normandes situées en zone périurbaine ressentent peut-être moins de pression concurrentielle à innover que celles de la région parisienne… Le plan Osez l’IA se veut justement attentif à combler ces fractures territoriales. La mobilisation des réseaux régionaux (Chambres de commerce, French Tech locales, Bpifrance en région, etc.) et l’organisation régulière d’événements dans chaque territoire viseront à ce qu’aucune entreprise, de Cherbourg à Alençon, ne soit laissée de côté. L’IA doit être une opportunité pour tous, pas un facteur de creusement des écarts entre les « branchés » et les autres.
Si le gouvernement agit, c’est que la réalité de l’IA en entreprise est encore timide. Une étude Bpifrance Le Lab publiée en juin 2025 dresse un constat sans appel : certes 58 % des dirigeants de PME-ETI jugent l’IA « importante voire très importante » pour la survie de leur entreprise à horizon 3-5 ans, mais dans les faits l’adoption reste très limitée. Seules 32 % des PME/ETI interrogées utilisent effectivement l’IA aujourd’hui. Ce taux place la France en retard, puisque c’est deux fois moins que chez nos voisins allemands ou américains. En outre, la plupart de ces entreprises sont encore en phase exploratoire : plus de la moitié se contentent d’outils gratuits ou prêts-à-l’emploi (typiquement, le petit essai de ChatGPT gratuit à la pause déjeuner). Seulement 43 % des dirigeants ont formalisé une véritable stratégie IA pour leur entreprise – les autres y vont au feeling ou attendent de « voir venir ».
Pourquoi un tel décalage entre le discours et l’action ? D’abord, parce que l’adoption de l’IA nécessite des fondations solides. Or beaucoup de PME n’ont pas encore achevé leur transformation numérique. Selon Bpifrance, 43 % des PME-ETI n’analysent même pas leurs données pour piloter leur activité. Pas de données bien structurées, pas de carburant pour faire tourner une IA efficace… Sans surprise, une entreprise déjà engagée dans sa transformation digitale est 5 fois plus susceptible d’utiliser l’IA qu’une entreprise restée au tout-papier. De même, celles qui analysent leurs données sont 2,5 fois plus enclines à passer à l’IA. En clair, beaucoup de PME doivent d’abord combler leur retard numérique avant de pouvoir tirer parti de l’IA.
Viennent ensuite les freins classiques : la technologie IA est perçue comme complexe, souvent immature, et surtout coûteuse. Le coût est d’ailleurs le frein numéro un cité par les dirigeants interrogés. Investir dans un projet IA sur-mesure peut sembler un pari risqué, avec un retour sur investissement incertain. Difficile, pour un patron de petite structure, de savoir par quel bout prendre l’IA : 23 % avouent avoir du mal à identifier des cas d’usage pertinents, et 33 % craignent de possibles mauvais usages (par exemple la fuite de données confidentielles via un chatbot mal contrôlé). Sans accompagnement, beaucoup préfèrent donc temporiser. Cette prudence généralisée n’est pas forcément un mal : à trop se précipiter sur la dernière mode techno, on risquerait des investissements peu rentables. Comme le note Bpifrance, même les entreprises pionnières gardent une approche mesurée et attendent que l’offre murisse et que les coûts baissent. Autrement dit, la révolution de l’IA dans les PME ressemble plus à une évolution tranquille qu’à un tsunami soudain
Impossible d’évoquer l’IA en 2025 sans parler du raz-de-marée de l’IA générative. Depuis l’arrivée de ChatGPT (OpenAI) fin 2022, rapidement suivi par des alternatives comme Google Bard/Gemini ou Microsoft Copilot, ces outils capables de produire du texte ou du code tout seuls ont conquis le grand public… et infiltré le monde du travail. Près de 45 % des Français ont déjà utilisé une IA générative, et parmi eux 43 % le font dans un cadre professionnel. En apparence, l’enthousiasme est là : les jeunes diplômés l’utilisent volontiers pour gagner du temps ou trouver de l’inspiration. Le baromètre Ifop/Talan 2025 révèle ainsi qu’une véritable fracture générationnelle existe : 85 % des 18-24 ans sont friands des IA génératives, contre seulement 31 % des plus de 35 ans. Il y a fort à parier que les stagiaires de vos services maîtrisent ChatGPT bien plus que leurs managers quinquagénaires… ?
Cependant, l’introduction de ces IA génère aussi son lot de flou et de méfiance en entreprise. Beaucoup de salariés expérimentent ChatGPT de leur propre initiative, sans en parler officiellement. En 2023, on apprenait que 68 % des employés qui utilisent l’IA générative au travail le cachent à leur supérieur hiérarchique. La raison ? L’absence de règles claires, la peur d’avouer qu’on s’appuie sur une « machine » ou d’être mal jugé. Sans cadre défini par l’employeur, l’IA générative est entrée par la petite porte dans les bureaux : on l’utilise en douce pour traduire un texte, résumer un rapport ou trouver des idées, mais officieusement. D’autant que côté employeurs, la structuration est lente : seuls 9 % des salariés disposent aujourd’hui d’un outil d’IA générative mis à disposition officiellement par leur entreprise, et près de la moitié affirment que leur employeur n’a pas l’intention de s’engager dans cette voie. Autrement dit, beaucoup de dirigeants préfèrent freiner ou attendre, laissant leurs équipes dans le flou.
Ce décalage explique aussi le défi de la formation évoqué plus haut. Si l’entreprise ne formalise pas l’usage de ces outils, difficile de former les équipes correctement. Résultat, seuls 15 % des salariés interrogés par l’Ifop disent avoir été formés à l’utilisation des IA génératives, tandis que 73 % se sentent insuffisamment préparés pour en tirer parti. Houston, on a un problème (de compétences). La bonne nouvelle, c’est que les employés veulent apprendre : 86 % des salariés se disent prêts à suivre une formation pour adapter leurs compétences à l’IA. Les chefs d’entreprise ont donc tout intérêt à accompagner la montée en compétence interne, sous peine de voir l’IA demeurer un outil bricolé en solitaire par quelques salariés cachotiers.
En 2025, le leader incontesté des IA génératives en usage reste ChatGPT, plébiscité par 72 % des utilisateurs ; loin derrière viennent Google Gemini (20 %), Microsoft Copilot (12 %) ou des solutions françaises comme Mistral (6 %). L’écosystème d’IA générative est donc aujourd’hui largement dominé par les outils américains. Cela soulève un point crucial pour nos entreprises et nos dirigeants politiques : celui de la souveraineté et de la maîtrise des données. Selon le baromètre Ifop/Talan, la première inquiétude des Français vis-à-vis de l’IA, citée par 60 % des répondants, est une dépendance excessive aux technologies étrangères. En clair, on redoute de devenir captifs des GAFAM pour nos outils du quotidien en entreprise. La deuxième crainte majeure concerne la propriété intellectuelle des contenus générés (qui est responsable en cas d’erreur ou de plagiat ? Mystère…). Et la troisième grande préoccupation, pour 65 % des gens, ce sont les risques de sécurité des données. Pas étonnant : demander à un chatbot américain de traiter des données sensibles d’une PME normande peut faire grincer des dents, tant qu’on n’a pas de garanties sur la confidentialité.
Ces enjeux de souveraineté numérique ne sont pas théoriques. Ils expliquent par exemple l’essor de startups françaises comme Mistral AI, qui ambitionnent de proposer des alternatives made in France à ChatGPT, pour que nos entreprises disposent d’outils fiables hébergés en Europe. Ils poussent aussi l’État et l’UE à encadrer juridiquement l’IA (IA Act européen en préparation) afin d’instaurer la confiance nécessaire. En attendant, chaque dirigeant doit trouver le bon équilibre : profiter des avantages de ces nouveaux outils (gains de productivité, aide à la rédaction, support client automatisé…) tout en gérant les risques (protection des données, conformité, etc.). Cela passe souvent par la définition d’une charte interne sur l’utilisation de l’IA, la sensibilisation du personnel aux bonnes pratiques (ne pas copier-coller des infos confidentielles dans ChatGPT, par exemple !), et le choix d’outils conformes à la réglementation européenne.
« Oser l’IA », c’est le défi des années à venir pour nos TPE, PME et ETI en Normandie comme ailleurs. L’intelligence artificielle n’est plus un gadget de Silicon Valley, c’est un véritable levier de compétitivité à portée de main – avec à la clé jusqu’à +20 % de gain de productivité moyen par entreprise selon Bercy. Le gouvernement l’a bien compris en déployant un plan national pour informer, former et soutenir financièrement les entreprises prêtes à faire le saut. Les études récentes de Bpifrance Le Lab et de l’Ifop confirment, elles, que si l’intérêt pour l’IA est réel (une majorité de dirigeants y voit un enjeu de survie), le passage à l’acte reste timide et inégal. Retard de la transformation digitale, manque de compétences, crainte de l’inconnu ou du big brother… les obstacles ne manquent pas.
La bonne nouvelle, c’est que des solutions d’accompagnement existent pour transformer l’essai sans le rater. Avec les bons conseils, une montée en compétence adaptée et un choix judicieux de cas d’usage, même une petite entreprise normande peut intégrer l’IA à son échelle et en récolter les fruits. L’objectif n’est pas de faire de chaque PME un laboratoire de R&D en IA, mais de trouver où l’IA peut apporter de la valeur ajoutée (gagner du temps sur des tâches répétitives, mieux analyser sa relation client, optimiser ses stocks, etc.) et de l’implémenter intelligemment. Cela peut commencer modestement – par un projet pilote avec un outil générique – puis s’amplifier une fois la confiance établie.
En Normandie, iD Labs s’est donné pour mission d’accompagner les entreprises locales dans cette intégration de l’IA au quotidien. Nous pensons qu’avec une approche pédagogique (et un brin d’humour pour dédramatiser le sujet ?), il est possible de démystifier l’IA et d’aider chaque dirigeant à y voir clair pour son propre business. L’IA n’automatisera pas miraculeusement toute votre entreprise du jour au lendemain – et ce n’est pas demain que ChatGPT remplacera votre bonne vieille machine à café ! – mais elle peut dès aujourd’hui vous faire gagner un temps précieux et ouvrir de nouvelles perspectives. Pour en bénéficier, n’hésitez pas à vous faire accompagner dans cette aventure technologique. Après tout, « oser l’IA » est plus facile quand on n’est pas tout seul pour franchir le pas. ?
Et si on se retrouvait pour un Digital Breakfast afin d'échanger et mieux comprendre l'impact de l'IA.
Retrouvons nous le 23 septembre - Conférence gratuite !! inscrivez-vous